Par Ahmed FAOUZI*
Le chef de l’État de la République démocratique du Congo, Felix Tshisekidi préside aux destinées de l’Union-africaine pour l’année en cours. Il remplace son collègue de l’Afrique du Sud Cyril Ramaphosa. Les deux pays ont été à la tête de l’Organisation africaine à deux reprises, en 1967 pour la RDC sous le maréchal Mobutu Sesse Seko, et en 2002 pour l’Afrique du Sud sous l’autorité de Thabo Mbeki.
Le bilan de Ramaphosa à la tête de l’Union africaine reste mitigé. L’entrée en vigueur de la zone de libre-échange continentale, ZLECAF, est l’événement phare de cette présidence. En présidant aux destinées de l’organisation, Pretoria a tenu à renforcer son influence économique au sein du continent en privilégiant ses propres entreprises dans le domaine industriel, minier, et dans la finance pour ne citer que ceux-là. Pr contre, pour résoudre les problèmes politiques et les conflits interafricains, ses positions idéologiques trop marquées, n’ont pas permis d’aller vers plus de paix et de stabilité.
En raison de sa situation géostratégique et de son histoire, la RDC compte adopter une politique pragmatique pour faire taire les armes et réduire les conflits en Afrique. Contrairement à l’Afrique du Sud, la RDC aura moins tendance à privilégier l’idéologie, les accointances ou la politique des axes dans ses démarches, elle qui pâtit des incursions des pays voisins et des menaces portées à son intégrité territoriale.
Partant de l’hypothèse que sans bonne gouvernance politique il ne peut y avoir de développement, le défi premier à relever reste la réduction des conflits et des tensions afro-africains qui sont souvent à l’origine des maux que subit le continent. Plus les confrontations entre États se multiplient plus il est difficile de venir à bout des difficultés politiques et économiques avec leurs effets sociaux induits sur les populations.
L’éducation de qualité est l’autre défi permanent auquel l’Afrique doit faire face car d’elle dépend de tout le reste. Le taux de natalité reste élevé, quand on sait que la population africaine passera de 1,4 milliard actuellement à 2,5 milliards en 2050. Les Africains auront donc besoin de doubler d’efforts pour dispenser une formation de qualité. Celle-ci permettrait d’acquérir des savoir-faire et des connaissances pour la mise en valeur des richesses africaines. Former les jeunes africains est une priorité absolue pour leur permettre de se rendre utiles et leur éviter de sombrer dans le désespoir, et d’alimenter conséquemment les zones de conflits et de guerre.
Ces jeunes une fois formés, devraient trouver les emplois adéquats auxquels ils aspirent pour se réaliser et participer ainsi au développement de leurs pays respectifs. Il faudrait renforcer le cadre incitatif pour leur permettre de ne pas compter uniquement sur les emplois de la fonction publique, mais les aider à prendre des initiatives privées en leur facilitant l’accès aux financements nécessaires. Dans ce cadre, l’instauration d’une zone de libre-échange africaine est une excellente opportunité pour dynamiser les échanges commerciaux au sein du continent.
La bonne gouvernance, la paix et l’éducation, sont donc les bases d’un développement harmonieux en Afrique. Elles sont les conditions sine qua non à la croissance économique souhaitée. Celle-ci ne peut être évaluée par le seul PIB par habitant mais doit prendre en considération l’indice de développement humain ou I’IDH. Celui-ci englobe tous les autres secteurs liés à la santé, à la sécurité alimentaire, aux taux de scolarisation et au niveau de vie de la population, particulièrement les femmes, les jeunes et les personnes vulnérables.
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La tâche est certainement ardue mais par la volonté politique et la détermination, l’Afrique peut tracer son destin et donner de l’espoir à ses peuples. Pour finir avec les économies de rente, l’exploitation des matières premières à des prix dérisoires, où nos pays ne contrôlent ni les capitaux ni les technologies ni les prix, il est temps d’encourager les transformations des richesses minières au sein du continent. Si les pays européens ont pu se développer c’est parce qu’ils ont su protéger et transformer sur place leurs charbons et leurs fers.
La période post-Covid est une opportunité pour notre continent, peu touché par la pandémie, pour mieux se préparer à ce monde en gestation, en comptant d’abord sur ses propres ressources humaines pour parer à toute éventualité. Face à tous les défis, seule la qualité de formation des femmes et des hommes africains pourra faire la différence. Il est temps de penser d’instaurer, au sein de l’Union africaine, un projet similaire au projet européen Erasmus d’échange d’étudiants entre les pays africains et entre ces derniers et les autres nations. C’est là où réside la vraie matière première à développer et c’est à ce niveau que le Maroc peut apporter tout son savoir faire.
Ancien Ambassadeur