2024, une année électorale cruciale pour l’Afrique

Par Bachir Abdallah

Plusieurs pays africains vont se rendre aux urnes en 2024, dans un contexte de crise sanitaire, sociale et environnementale. Ces élections pourraient avoir des conséquences majeures sur la situation politique et économique du continent, où la démocratie, la sécurité et le développement sont en jeu.

En République Démocratique du Congo, le Président sortant Félix Tshisekedi, candidat à sa propre succession, a été réélu le 20 décembre, malgré la contestation de l’opposition, qui remet en cause sa légitimité et dénonce les irrégularités du scrutin. La stabilité de ce pays, riche en ressources naturelles mais en proie à l’insécurité à l’Est, est essentielle pour l’équilibre de l’Afrique centrale.

Au Sénégal, la tension est vive à l’approche de la présidentielle de février 2024, après les violentes manifestations qui ont suivi l’arrestation de l’opposant Ousmane Sonko. Ses partisans, qui crient au complot politique, ont affronté les forces de l’ordre et réclamé la démission du Président Macky Sall. Ce dernier, conscient du risque que représenterait sa candidature pour un troisième mandat, a désigné son Premier ministre Amadou pour le représenter, ce qui a provoqué des dissensions au sein de sa coalition, le Benno Bokk yakaar (BBY). Par ailleurs, les candidatures de Ousmane Sonko et de Karim Wade ont été invalidées par le Conseil constitutionnel. Le parti Pastef de Ousmane Sonko a toutefois trouvé un candidat en la personne de Bassirou Diomaye Faye, un de ses lieutenants, également emprisonné.

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En Afrique du Sud, le Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis la fin de l’apartheid, pourrait perdre sa majorité absolue lors des élections de mai 2024. Le parti du Président Cyril Ramaphosa, qui peine à redresser l’économie et à lutter contre la corruption, est menacé par la montée de l’opposition radicale et par la fragmentation de l’électorat. Selon un sondage afrobaromètre, 70 % des Sud-Africains souhaitent renforcer la démocratie dans leur pays, mais sont insatisfaits de la gestion des problèmes tels que la criminalité, l’électricité, le chômage et la corruption.

D’autres pays africains pourraient connaître un changement de pouvoir ou une réélection contestée en 2024. Au Ghana, l’opposition pourrait remporter les élections de décembre, face à un gouvernement qui n’a pas tenu ses promesses de développement et qui a plongé le pays dans l’endettement. À Madagascar, le Président Andry Rajoelina, qui a accédé au pouvoir par un coup d’État en 2009, a été réélu le 16 novembre. En Algérie et en Tunisie, les élections législatives seront l’occasion de mesurer le degré de démocratisation de ces pays du Maghreb, secoués par des mouvements populaires.

En Afrique de l’Ouest, la transition démocratique est mise à mal par les coups d’État militaires. Au Mali, le régime de la junte, qui a renversé le Président Ibrahim Boubacar Keïta en 2019, a reporté les élections prévues en février 2024, sans fixer de nouvelle date. Le chef de la junte, Ibrahim Traoré, s’est autoproclamé Président par intérim en juillet 2024, suscitant la condamnation de la communauté internationale. Le Mali, qui fait face à une grave crise sécuritaire et humanitaire, est sous la menace de sanctions de la CEDEAO, l’organisation régionale ouest-africaine. D’autres pays de la zone, comme le Niger, le Tchad, le Soudan, le Burkina Faso, la Guinée et la Guinée-Bissau, ont également connu des coups d’État ou des tentatives de coup d’État en 2024, fragilisant la stabilité de la région. Selon le think tank britannique Chatham House, l’Afrique de l’Ouest est la région la plus vulnérable aux coups d’État en Afrique, et pourrait connaître d’autres crises en 2024