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UE–UA : Bruxelles cherche à réancrer sa stratégie en Afrique

Le prochain sommet Union européenne–Union africaine se tiendra à Luanda, en Angola, fin novembre 2025. Un rendez-vous stratégique alors que le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, la percée continue de la Chine et le regain d’activisme russe bouleversent en profondeur les équilibres diplomatiques et économiques en Afrique.

Trois ans après le sommet de Bruxelles en février 2022, Européens et Africains se retrouveront fin novembre dans la capitale angolaise, Luanda, pour une nouvelle session du partenariat UA–UE. Loin de se dérouler dans un climat apaisé, ce sommet intervient dans un moment de bascule pour les relations internationales, où l’Afrique devient à nouveau un terrain de compétition géopolitique majeur.

La réélection de Donald Trump aux États-Unis, actée en novembre 2024, a entraîné un tournant abrupt dans la politique africaine de Washington. Dans une démarche atypique, l’ancien président, désormais reconduit à la Maison Blanche, prévoit d’inviter une dizaine de chefs d’État africains à Washington dans les prochaines semaines, avec pour objectif affiché de repositionner les États-Unis dans le jeu diplomatique africain. En parallèle, la Chine a renforcé sa présence stratégique, comme en témoigne le dernier sommet du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC), où Pékin a annoncé une enveloppe globale de 60 milliards de dollars d’investissements additionnels sur trois ans, portant sur les infrastructures, l’énergie, la santé et la cybersécurité.

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Face à cette concurrence frontale, l’Union européenne apparaît en retrait, malgré les annonces formulées à Bruxelles depuis 2021 dans le cadre de sa stratégie « Global Gateway ». Ce programme censé constituer une alternative aux Nouvelles routes de la soie peine à se traduire concrètement. À ce jour, l’UE a engagé 150 milliards d’euros d’investissements en Afrique à l’horizon 2030, un montant qui englobe les projets d’infrastructures durables, les chaînes de valeur vertes, la transition numérique et la santé.

À Luanda, la Commission européenne espère relancer une dynamique de confiance et maintenir l’ancrage européen dans des régions en voie de réarticulation stratégique, notamment en Afrique de l’Ouest, dans la Corne et au Sahel. Mais le défi est immense : la perte d’influence politique, les critiques sur le traitement migratoire, ainsi que les divergences entre États membres sur la politique extérieure, affaiblissent la voix de Bruxelles sur le continent.

Compétition ouverte entre partenaires internationaux

L’Afrique attire désormais les investissements et les appétits d’une multitude d’acteurs aux logiques parfois concurrentes. Selon les données consolidées de la Banque africaine de développement (BAD), la Chine reste le premier bailleur bilatéral d’infrastructures en Afrique, avec près de 155 milliards de dollars investis entre 2000 et 2022, concentrés notamment dans les chemins de fer, les ports, les routes, les réseaux électriques et les barrages. Le dernier plan chinois adopté lors du FOCAC 2024 prévoit aussi un renforcement de l’intégration numérique, via la mise en place de corridors de données sécurisés, de centres cloud et d’outils de gouvernance algorithmique.

De leur côté, les États-Unis ont réaffirmé leur engagement à travers l’Initiative Prosper Africa, et injecté environ 30 milliards de dollars sur la période 2022–2024, avec un accent mis sur l’entrepreneuriat africain, les PME, les services numériques et les infrastructures énergétiques. La Société américaine de financement du développement international (DFC) est désormais active dans plus de 30 pays du continent, avec des projets phares au Kenya, au Ghana, au Sénégal et en Afrique du Sud.

Face à ces deux géants, l’Union européenne tente de se repositionner en misant sur la qualité, la transparence et la durabilité des investissements. Le sommet de Luanda devrait être l’occasion pour Bruxelles d’annoncer de nouveaux engagements sectoriels, notamment dans l’agriculture résiliente, l’accès à l’énergie propre, la valorisation des chaînes de valeur locales, ainsi que le développement d’infrastructures « vertes » adaptées aux réalités africaines.

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