À Lusaka, le géant marocain des engrais OCP Africa a officialisé, ce 7 mai, un partenariat stratégique avec la société zambienne de développement industriel (IDC). Objectif affiché : transformer les bases du modèle agricole zambien en l’arrimant à une vision durable, technologiquement avancée et résolument tournée vers la souveraineté alimentaire.
Malgré un contexte de pressions croissantes sur les systèmes agricoles africains — entre dépendance aux intrants importés, instabilité climatique et besoins alimentaires exponentiels — la démarche s’inscrit dans une dynamique continentale plus large : repenser la production agricole non plus comme simple subsistance, mais comme levier de développement, d’autonomie et d’innovation.
La cérémonie de signature, tenue à Lusaka en présence du ministre zambien de l’Agriculture Reuben Mtolo Phiri, de l’ambassadeur du Maroc Mohamed Kalakhi, et des deux PDG, Mohamed Hettiti (OCP Africa) et Cornwell Muleya (IDC), a symbolisé bien plus qu’un simple accord de coopération. Elle a acté l’émergence d’un nouveau paradigme agro-industriel, fondé sur la convergence des savoirs techniques, des engagements politiques et des ressources naturelles.
Au cœur de ce partenariat : l’implantation d’un domaine agricole pilote de grande envergure. Pensé comme un laboratoire à ciel ouvert, ce site permettra de tester des formulations d’engrais sur mesure, adaptées aux spécificités des sols zambiens. L’ambition dépasse l’expérimentation : il s’agit de générer des données, des méthodes, des pratiques qui pourront être transférées aux exploitations paysannes environnantes. En somme, faire du terrain une matrice de transformation systémique.
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Conscients que toute ambition industrielle reste lettre morte sans capital humain qualifié, OCP Africa et l’IDC ont intégré à l’accord un important volet de formation. Des programmes adaptés seront mis en œuvre pour professionnaliser les agriculteurs, les techniciens et les gestionnaires locaux. À travers ce maillage de savoirs, le partenariat entend favoriser une appropriation locale du projet, condition sine qua non de sa durabilité.
Quatre piliers structurent cette alliance : le domaine agricole de démonstration, l’organisation logistique des matières premières, les cycles de perfectionnement professionnel, et l’implantation d’une unité locale de fabrication d’engrais. Ce dernier point, souvent négligé dans les projets agricoles, revêt une importance stratégique : il s’agit d’ancrer la transformation industrielle sur le sol zambien, en créant des chaînes de valeur complètes, du champ à l’usine.
Souveraineté et diplomatie économique
Au-delà des retombées techniques ou économiques, l’accord scelle un choix politique. Celui d’un partenariat Sud-Sud ambitieux, entre une puissance émergente du Maghreb et un pays d’Afrique australe en quête de renouveau agricole. Pour le Maroc, c’est aussi l’expression d’une diplomatie économique offensive, qui mise sur la fertilité des coopérations africaines plutôt que sur l’assistanat classique des bailleurs traditionnels.
Mohamed Hettiti, PDG d’OCP Africa, l’a résumé sans détour : « Nous mettons à disposition des agriculteurs zambiens les moyens d’accroître leurs rendements et d’améliorer leurs conditions de vie. » Cornwell Muleya, son homologue zambien, a quant à lui salué une « page majeure de l’histoire de la Zambie » qui pourrait bien marquer un tournant vers l’autosuffisance.
Prochaine étape : une étude de faisabilité détaillée sera lancée dans les semaines à venir. Mais déjà, les deux partenaires affichent leur volonté de faire de ce projet un modèle reproductible à l’échelle régionale. L’agriculture zambienne pourrait ainsi devenir, demain, un laboratoire pour une Afrique plus souveraine, plus verte, et mieux armée face aux défis de sécurité alimentaire.