La question de l’exode massif du personnel médical au Nigeria est revenue avec force au devant de la scène médiatique et politique, après la publication des chiffres inquiétants faisant état du départ de pas moins de 16.000 médecins à l’étranger au cours des sept dernières années.
Ces professionnels de santé tant appréciés pour leur expertise médicale et leur rôle crucial dans un pays aux prises avec plusieurs épidémies en cours, sont tentés de plus en plus par des opportunités professionnelles meilleures à l’étranger, dans un contexte de demande mondiale accrue sur les services du personnel soignant.
Des perspectives d’évolution rapide, un environnement de travail sain, des rémunérations attractives… Nombreux sont les facteurs qui incitent ce personnel hautement qualifié à quitter leur terre natale, emboîtant le pas à des milliers de leurs confrères qui poursuivent leurs carrières à l’étranger dans plusieurs pays dont notamment, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et le Canada.
Cette hémorragie, qui ne semble pas devoir s’arrêter prochainement, inquiète les autorités du secteur de la santé au pays le plus peuplé d’Afrique, où la population est confrontée à une multitude d’épidémies et de problèmes de santé publique, nécessitant un système de santé efficace, dont le pilier essentiel est un personnel médical qualifié et suffisant en effectif et en spécialités.
Tirant la sonnette d’alarme sur cette problématique majeure, le ministre nigérian de la santé et de la protection sociale, Muhammad Pate, a souligné lors d’une récente conférence à Abuja l’impact néfaste de l’exode massif des médecins sur les performances des établissements de santé et l’accès des citoyens aux services de santé, notant que ce phénomène touche toutes les catégories du personnel médical y compris les infirmiers et les aides-soignants.
Cette situation affecte négativement les indicateurs du développement humain, dans la mesure où la densité des médecins a chuté à 3,9 pour 10.000 habitants, bien en dessous des seuils préconisés à l’échelle mondiale, déplore le ministre, cité par les médias locaux.
Ce phénomène constitue également un lourd fardeau financier pour l’Etat nigérian qui dépense pas moins de 21.000 dollars pour la formation de chaque médecin, alors que plusieurs zones rurales demeurent mal desservies voire privées des services de santé, faute de personnel suffisant et de moyens matériels, a fait valoir le responsable.
Sur un ton optimiste, le ministre a indiqué que ce phénomène offre une opportunité pour redéfinir les politiques de la santé dans le pays, dans la perspective d’une meilleure valorisation du personnel soignant, pour qui des conditions optimales de travail sont primordiales pour garantir sa rétention.
Pour pallier ces problématiques, le gouvernement nigérian a lancé une série de mesures pour garder ses compétences en médecine et leur offrir un environnement serein de travail, avec à la clé des augmentations des salaires pour faire face à la cherté de la vie, dans un pays où l’inflation dépasse les 20%.
Dans cette optique, le Nigeria a mis en place la Politique nationale sur la migration du personnel de santé, portant sur des mesures destinées à renforcer la gouvernance du secteur de la santé, promouvoir la réintégration du personnel médical à l’étranger et perfectionner les procédures de recrutement pour répondre efficacement aux besoins du secteur de la santé.
Outre les défis liés aux ressources humaines, le Nigeria pâtit de nombreuses lacunes, notamment un déficit d’infrastructures médicales et un budget insuffisant pour répondre aux besoins d’une population dépassant les 230 millions d’habitants, avec une croissance démographique rapide.
Le paludisme demeure une problématique de santé majeure au Nigeria qui compte le plus grand nombre des cas au niveau mondial (près de 27%). La fièvre de Lassa et la méningite sont parmi les épidémies qui continuent à coûter la vie à des milliers de Nigérians chaque année, faute de prise en charge adéquate et de couverture d’assurance maladie.
D’après plusieurs experts, les partenariats public-privé (PPP) sont parmi les pistes novatrices à explorer par les autorités nigérianes, pour impliquer le secteur privé dans les efforts de développement d’infrastructures nécessitant d’énormes budgets, dans la perspective d’édifier un système de santé en mesure de répondre aux besoins urgents de la population nigériane.
Avec MAP