En 2024, de nombreux pays africains continuent de faire face à un taux de refus de visas Schengen parmi les plus élevés au monde. Une situation qui freine la mobilité, limite les opportunités économiques et engendre des pertes financières non négligeables.
Malgré les discours sur la coopération internationale et la mobilité équitable, les chiffres dévoilés par la Commission européenne et des institutions comme Henley & Partners dressent un constat préoccupant : les demandeurs africains de visa Schengen sont systématiquement désavantagés par rapport à leurs homologues d’autres régions du monde, notamment d’Asie.
Les données pour 2023 indiquent que, bien que les ressortissants africains aient formulé deux fois moins de demandes de visa que ceux d’Asie, ils étaient deux fois plus susceptibles de voir leur demande refusée, avec un écart moyen de 14 points de pourcentage. Cette inégalité se traduit par des situations aberrantes où des voyageurs remplissant toutes les conditions légales voient leur demande rejetée sans explication détaillée.
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Plus encore, les frais de dossier, souvent supérieurs à 80 euros par demande, sont non remboursables, ce qui représente une perte financière importante pour des citoyens dont le pouvoir d’achat est parfois limité.
Parmi les pays les plus touchés par les refus de visas Schengen en 2023, six nations africaines figurent parmi les dix affichant les taux de rejet les plus élevés au monde. Les Comores arrivent en tête avec un taux alarmant de 61,3 %, suivies de la Guinée-Bissau (51 %), du Ghana (47,5 %), du Mali (46,1 %), du Soudan (42,3 %) et du Sénégal (41,2 %).
Ce déséquilibre a des répercussions profondes. Il compromet les projets professionnels, éducatifs ou familiaux de milliers de personnes et entrave les dynamiques d’échanges économiques et culturels entre les continents.
Plusieurs facteurs systémiques alimentent cette situation. Les exigences documentaires imposées aux demandeurs sont particulièrement strictes : preuve de ressources financières suffisantes, assurance santé, attestation d’hébergement, itinéraire de voyage détaillé… Dans de nombreux pays africains, où une grande partie de l’économie repose sur le secteur informel, il est difficile de réunir ces justificatifs de manière conforme aux standards européens, ce qui mène souvent à des refus automatiques.
S’ajoute à cela un accès limité aux infrastructures consulaires. Dans certains pays, il n’existe qu’un seul centre de traitement des demandes de visa, souvent situé dans la capitale, obligeant les demandeurs à parcourir de longues distances, à patienter pendant des semaines, voire des mois, et à supporter des coûts logistiques supplémentaires. Cette concentration crée des embouteillages administratifs et décourage de nombreux candidats.
En plus, une perception migratoire biaisée pèse lourdement sur les décisions. Certaines nationalités africaines sont jugées à « haut risque migratoire », une notion souvent subjective, peu transparente, et rarement fondée sur des données concrètes. Cette stigmatisation conduit à un traitement défavorable des dossiers, indépendamment de la réalité individuelle du demandeur.
Face à cette situation, des experts plaident pour l’instauration d’un droit d’appel clair et accessible, permettant aux demandeurs de contester un refus et d’exiger une motivation formelle. D’autres recommandent une harmonisation des critères d’évaluation entre les consulats des différents États membres, afin de réduire les disparités d’un pays à l’autre. Cependant, plusieurs propositions mettent en avant la nécessité de développer des partenariats bilatéraux de mobilité, encadrés et équitables, pour faciliter les déplacements dans un cadre sécurisé et respectueux des droits humains.