L’économie zambienne se trouve à un «tournant inquiétant». Les perspectives pour 2024 se sont dégradées en raison d’un certain nombre de facteurs, dont la politique monétaire et la sécheresse.
Bien que la sécheresse a durement affecté la Zambie ces dernières années, comme d’ailleurs plusieurs autres pays d’Afrique australe, la réalité pratique sur le terrain est qu’elle n’est qu’un des principaux facteurs contribuant à la faible croissance du PIB du pays, qui est désormais projetée à 2,3 %, soit la moitié de la prévision de décembre 2023.
Des analystes économiques relèvent que l’autre facteur majeur contribuant à la faible croissance économique est la politique monétaire supervisée par le FMI, qui a créé une pénurie critique de liquidités dans l’économie zambienne, limitant ainsi les activités du secteur privé.
D’aucuns font constater, à ce propos, que depuis que le FMI a mis en œuvre son programme de Facilité élargie de crédit (FEC) et sa politique monétaire extrême, les principaux indicateurs économiques sont en baisse, en particulier la croissance : 2021 (5,8 %), 2022 (5,2 %), 2023 (4,7 %) et selon les projections pour 2024 elle devrait atteindre 2,3 %.
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L’analyste économique zambien Oliver Saasa fait constater, à cet égard, que lorsque le FMI a mis en œuvre sa Facilité élargie de crédit en août 2022, l’inflation en Zambie était à un seul chiffre, à 9,8 %, mais après vingt-deux mois de programme, l’inflation est passée à 15,2 % à fin juin dernier, malgré la politique monétaire stricte.
«La politique monétaire extrême inspirée par le FMI ne peut à elle seule ni maîtriser l’inflation zambienne ni faire croître l’économie, en raison de la structure unique de l’économie zambienne», estime-t-il. La Banque centrale de Zambie a augmenté le taux de la politique monétaire à 13,5 %, contre 9,0 % en août 2022, alors que le ratio des réserves obligatoires est également passé de 9,0 % en 2022 à 26,5 % en 2024, ce qui a entraîné des taux d’intérêt élevés et une pénurie critique de liquidités.
Idem pour l’économiste Maliwanda Simumba, qui a, lui aussi, critiqué la politique monétaire extrême du pays. La Zambie est confrontée à une situation économique appelée stagflation, une combinaison d’inflation et de stagnation de l’économie, a-t-il dit, arguant qu’on peut tolérer une certaine inflation, mais pas de déflation ou de stagnation.
Ces économistes ont également remis en question l’utilisation de l’instrument de politique monétaire pour résoudre les problèmes économiques de la Zambie. «On ne peut pas résoudre complètement un problème budgétaire avec les instruments monétaires», soutiennent-ils.
Ils font également constater que l’expérience actuelle de la Zambie dans le cadre du programme de Facilité élargie de crédit est similaire à celle du Mozambique, qui bénéficie depuis mai 2022 d’un programme triennal de 456 millions de dollars du FMI.
Alfredo Mondlane, responsable de l’économie et de la recherche à la banque nationale du Mozambique, a déploré que cette politique monétaire affecte négativement le secteur bancaire et le secteur privé. «Pour stimuler l’économie, il faut que le taux de réserves obligatoires baisse, or ce taux de la Banque du Mozambique est actuellement de 39 %, un coefficient élevé qui rend l’accès au crédit plus difficile», explique-t-il.
Ces analystes économiques soutiennent, en se basant sur l’expérience de la Zambie et du Mozambique, que, tout comme dans le cadre du Programme d’ajustement structurel (PAS), le nouveau programme de Facilité élargie de crédit est inflexible et ne semble pas tenir compte des circonstances économiques concrètes de chaque pays.