L’Afrique du Sud face à des choix économiques difficiles

Johannesburg

En Afrique du Sud, tous les regards sont actuellement tournés vers le ministre des Finances, Enoch Godongwana, qui présentera le 21 février la déclaration budgétaire, sur fond de crise et de choix économiques «difficiles».

C’est que les attentes sont grandes quant aux mesures qui répondront aux nombreux défis économiques du pays, notamment la crise budgétaire, la hausse de l’inflation, la flambée des taux d’intérêt, l’accroissement de la dette publique, les délestages électriques récurrents et les revendications salariales dans la fonction publique, entre autres.

Commentant le prochain Budget, Frank Blackmore, économiste chez KPMG, a souligné l’importance cruciale de parvenir à des finances publiques durables, relevant les défis posés par les dépenses importantes du pays, telles que la masse salariale publique, le remboursement de la dette et la protection sociale, qui consomment ensemble une part substantielle du Budget.

«Il est très important pour l’Afrique du Sud de rétablir des finances publiques viables et de stabiliser le navire. La crédibilité de l’ensemble du processus budgétaire en dépend», a-t-il déclaré.

M. Blackmore a suggéré que l’accent soit mis sur la restriction des dépenses publiques plutôt que sur l’augmentation des taux d’imposition, avec une attention particulière sur les dépenses en capital ciblées pour stimuler la croissance économique. L’objectif, a-t-il réitéré, est de maintenir le caractère progressif du système fiscal tout en garantissant la stabilité financière.

L’ampleur du précipice financier est telle que tous les départements publics ont été sommés, en 2023, de geler les recrutements et les postes vacants et de mettre en œuvre des mesures pour contenir les coûts opérationnels.

Dans ce contexte, les économistes estiment que le prochain discours sur le budget devrait se concentrer sur les stratégies visant à accroître les recettes des finances publiques et à relancer la reprise économique. La fiscalité figurera probablement en bonne place comme outil auquel le gouvernement aura probablement recours pour générer des flux de revenus supplémentaires.

Ils font constater, à ce propos, qu’après les coûts de la masse salariale publique, qui représente environ 30 % du budget, du remboursement de la dette (18 %) et de la protection sociale (18 %), il ne reste plus qu’environ un tiers du budget pour couvrir toutes les autres charges.

Et cela ne tient pas compte de l’argent perdu à cause de la corruption généralisée et de la mauvaise gestion en cours de route, notent les experts qui s’attendent aussi à une plus grande volatilité du cadre politique à l’approche des élections générales qui auront lieu plus tard cette année.

«Les tendances économiques actuelles laissent présager des risques accrus de stagnation en 2024. Sans une reprise durable de la demande et une augmentation des investissements, la croissance économique généralisée nécessaire pour stimuler l’emploi ne pourra pas se produire», a expliqué Van der Linde, économiste principal chez Oxford Economics Africa.

Les analystes doutent que le Congrès National Africain (ANC au pouvoir) soit bien placé pour mettre en place des réformes de politique économique à un moment où le soutien et la confiance dans le parti diminuent, en raison de la corruption, de la captation de l’État et des lacunes persistantes en matière de gouvernance d’entreprise.

Ils estiment ainsi que le gouvernement dirigé par l’ANC est à court d’idées pour relever les nombreux défis du pays, l’économie sud-africaine fonctionnant de manière très inefficace et les industries nationales perdant en compétitivité.