L’Afrique s’apprête à franchir un tournant stratégique dans sa quête de souveraineté énergétique. La Banque Africaine de l’Énergie (BAE), fruit d’une collaboration entre l’Organisation des Producteurs de Pétrole Africains (APPO) et Afreximbank, entamera officiellement ses activités en juin 2025. L’annonce a été faite par M. Bruno Jean-Richard Itoua, ministre congolais des Hydrocarbures, en marge de la 4e session extraordinaire des ministres de l’APPO, tenue le 3 avril 2025 à Brazzaville, en République du Congo.
Initialement prévu pour janvier 2024, le lancement de la BAE avait été reporté pour des raisons de finalisation institutionnelle et de mobilisation des contributions des États membres. Le Nigeria, qui accueillera le siège de la banque à Abuja, a déjà injecté une contribution initiale de 100 millions de dollars, marquant son engagement à jouer un rôle de premier plan dans cette initiative panafricaine.
La Banque Africaine de l’Énergie sera dotée d’un capital de 5 milliards de dollars, destiné à combler le déficit chronique de financement dans le secteur énergétique africain. L’objectif est clair : soutenir le développement de projets énergétiques stratégiques sur l’ensemble du continent, qu’il s’agisse de ressources fossiles (pétrole et gaz) ou d’énergies renouvelables.
Cette approche hybride répond à une double nécessité : valoriser les ressources existantes pour accélérer la croissance économique à court terme, tout en investissant dans la transition énergétique pour assurer un avenir durable.
Environ 600 millions d’Africains vivent encore sans accès à l’électricité, selon les données de l’Agence Internationale de l’Energie (AIE). Le déficit d’infrastructures, la dépendance aux financements extérieurs et les conditions de prêts restrictives ont longtemps freiné le développement énergétique du continent.
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La BAE aura pour missions prioritaires de financer les projets pétroliers et gaziers dans les pays membres de l’APPO pour garantir l’autosuffisance énergétique ; de soutenir la mise en place d’infrastructures d’énergies renouvelables (solaire, hydraulique, éolien, biomasse) dans le cadre de la transition énergétique ; d’accompagner les pays dans le développement de capacités locales en ingénierie, production et distribution d’énergie ; ainsi que de faciliter la coopération régionale en matière d’interconnexion énergétique et de marchés communs.
Avec 18 pays membres au sein de l’APPO, représentant plus de 90 % des réserves pétrolières prouvées d’Afrique, la BAE est appelée à devenir un levier majeur pour le développement énergétique du continent. Toutefois, son succès dépendra de plusieurs facteurs : la capacité des États membres à honorer leurs engagements, la gouvernance fondée sur la transparente de l’institution, l’attractivité pour les investisseurs privés et le bon équilibre entre exploitation des ressources fossiles et transition verte.
À terme, la Banque Africaine de l’Énergie pourrait également jouer un rôle crucial dans l’harmonisation des politiques énergétiques africaines, en soutenant la mise en place d’un marché continental intégré de l’énergie, en cohérence avec les objectifs de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf).