En accueillant Khalid Safir, directeur général de la Caisse de dépôt et de gestion (CDG) du Maroc, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) du Sénégal entend franchir un nouveau cap dans sa stratégie de développement. Pour Fadilou Keïta, directeur général de la CDC sénégalaise, cette visite est bien plus qu’un protocole : elle incarne une opportunité d’apprentissage stratégique auprès d’un acteur dont l’expertise, forte de plusieurs décennies, suscite l’admiration.
« La Caisse de dépôt et de gestion du Maroc a quasiment 70 ans. Celle du Sénégal va bientôt fêter ses 19 ans. Nous avons énormément de choses à apprendre d’elle », a confié M. Keïta à l’APS, en marge d’une série de visites sur des chantiers immobiliers à Dakar en compagnie de son homologue marocain. « Le fait d’accueillir son directeur général au Sénégal nous permet de capitaliser un certain nombre de choses. Au Maroc, quasiment tout ce qui se fait en matière de financement, de développement et d’investissement se fait avec la CDG. »
Les deux dirigeants ont ainsi visité plusieurs projets emblématiques de la CDC, notamment sur le site de l’ancienne piste de l’aéroport de Dakar, aux Mamelles, et aux Almadies. Des projets que le patron marocain a salués : « Je suis impressionné par le nombre de chantiers que j’ai vus, lesquels sont révélateurs du dynamisme de l’économie de la ville de Dakar. »
Des ambitions partagées, des défis convergents
La rencontre entre les deux institutions s’inscrit dans le prolongement du mémorandum d’entente signé il y a un peu plus d’un an. Il s’agissait pour les partenaires de faire le point sur son application, mais surtout d’identifier des pistes concrètes de coopération. « Il peut y avoir des perspectives de coopération entre nos filiales. Nous devons aussi discuter de possibilités de financement de nos économies », a expliqué M. Keïta, qui voit dans les CDC africaines des leviers essentiels pour répondre aux besoins de développement dans un contexte de surendettement généralisé.
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À cet égard, Khalid Safir a insisté sur la convergence des missions des deux institutions : « Nous partageons la même ADN, à savoir le fait de recevoir des fonds sur lesquels nous devons veiller, des fonds que nous devons sécuriser et fructifier. Nous partageons aussi des valeurs et des ambitions communes en matière d’investissement. »
Les échanges ont aussi abordé les perspectives de collaboration multilatérale, dans le cadre du réseau africain des caisses de dépôt. « Nous pouvons conduire ensemble des projets, aussi bien au niveau bilatéral qu’au sein de partenariats plus larges », a précisé le directeur général marocain.
Structuration urbaine et vigilance immobilière
L’un des volets majeurs de la visite a porté sur la politique immobilière de la CDC du Sénégal. « Ces projets en cours de restructuration permettront de redéfinir le visage urbain des quartiers où ils se trouvent », a souligné Fadilou Keïta. Il a notamment établi un parallèle avec un modèle similaire déployé par la CDG au Maroc, qui a su reconvertir une ancienne piste d’aéroport en projet urbain de référence.
Mais cette dynamique de développement urbain ne va pas sans obstacles. Le directeur général sénégalais a reconnu l’existence d’irrégularités dans la conduite de certains chantiers. Concernant la tour des Mamelles, il a évoqué « une forme d’anarchie », indiquant que le contrat avec l’entrepreneur avait été résilié, occasionnant un retard de trois ans et un manque à gagner estimé à 18 milliards de francs CFA.
Pour la CDC du Sénégal, l’enjeu est désormais double : apprendre des bonnes pratiques marocaines tout en renforçant ses propres capacités opérationnelles et financières. L’ouverture aux investisseurs privés nationaux et étrangers est présentée comme une priorité pour accélérer le financement des projets structurants. Une dynamique que la coopération avec la CDG du Maroc devrait venir consolider durablement.