Mouhamet Ndiongue
Dans les couloirs de la justice marocaine, une crise silencieuse mais profonde se dessine. Le Conseil supérieur de la magistrature (CSPJ) tire la sonnette d’alarme : le Maroc fait face à une pénurie aiguë de juges, avec pas moins de 235 postes vacants qui ébranlent les fondations même du système judiciaire, particulièrement dans les grandes villes et au sein de la prestigieuse Cour de cassation.
Le Maroc est confronté à une pénurie de juges. Cette révélation, issue d’une liste interne du CSPJ et relayée par le journal Assabah, met en lumière les problèmes auxquels est confronté le système judiciaire, déjà écorné par une image ternie et une confiance érodée de la population. La justice, pilier de l’état de droit, semble vaciller sous le poids de cette absence criante de magistrats.
Face à cette situation, le CSPJ ne reste pas les bras croisés. Une séance de mobilité est organisée, offrant aux juges l’opportunité de manifester leur désir de mutation d’un tribunal à un autre. Des justifications variées sont avancées, allant de motifs familiaux à des impératifs de santé, reflétant la complexité humaine derrière la fonction judiciaire.
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Le rapport du CSPJ ne se contente pas de dresser un état des lieux ; il s’attache également à en déceler les causes. Parmi elles, le vieillissement inéluctable du corps judiciaire, qui voit un nombre croissant de juges s’éclipser vers la retraite chaque année. S’ajoute à cela une réalité surprenante : certains juges, bien que nommés, ne traitent aucune affaire judiciaire, absorbés par des tâches administratives ou détachés à l’étranger pour des missions diplomatiques.
Depuis 2021, le CSPJ, à la tête de l’Institut supérieur de la magistrature (ISM), s’efforce de relever un défi de taille : assurer une formation de qualité aux futurs juges. L’année 2023 verra l’entrée de 250 nouveaux professionnels du droit issus de l’ISM, et l’on attend 550 autres avant la fin de 2024. Ces chiffres sont porteurs d’espoir, mais suffiront-ils à combler le vide laissé par ceux qui partent et à restaurer la confiance dans une institution aussi cruciale que la justice ?
La question demeure ouverte, et le Maroc, à l’instar de nombreux pays, doit naviguer entre les écueils d’un système judiciaire en tension et la quête d’une justice équitable et accessible à tous. C’est dans ce contexte que le CSPJ et l’ISM jouent un rôle déterminant, celui de bâtisseurs d’une justice renouvelée, plus proche des citoyens et à la hauteur des enjeux contemporains.