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Intégration financière : l’Afrique à la conquête des 1 000 milliards de dollars

Alors que l’Afrique consolide son intégration économique, les paiements transfrontaliers apparaissent comme un levier stratégique pour l’essor continental. Selon un rapport publié le 27 mai 2025 par Oui Capital, leur valeur pourrait atteindre 1 000 milliards de dollars en 2035, soit trois fois plus qu’en 2025. Une perspective ambitieuse, portée par l’essor des solutions numériques et les initiatives panafricaines, mais encore entravée par des défis structurels persistants.

Intitulé « Africa’s cross-border payment landscape », le rapport de Oui Capital anticipe un taux de croissance annuel de 12 % sur la prochaine décennie. Le développement des paiements numériques, conjugué à l’augmentation des flux migratoires intra-africains, constitue le socle de cette dynamique.

Le mobile money joue un rôle moteur. En 2024, il représentait déjà 30 % des transferts transfrontaliers en Afrique, contribuant à faire baisser les frais de transaction à des niveaux inédits (1,5 à 3 %, contre plus de 7 % pour les banques traditionnelles). Cette baisse drastique des coûts bénéficie particulièrement aux PME et aux travailleurs indépendants, qui profitent aussi de l’essor des fintechs africaines. Ces dernières proposent des solutions jusqu’à 90 % moins onéreuses que les canaux bancaires classiques, grâce à l’exploitation de technologies de rupture, telles que la blockchain.

Les transferts blockchain, eux, promettent des règlements quasi instantanés et pratiquement gratuits, dessinant les contours d’un futur écosystème financier interconnecté et décentralisé.

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Malgré ces avancées, le paysage des paiements transfrontaliers en Afrique reste freiné par une série de contraintes structurelles. Les canaux informels et les transferts bancaires classiques continuent de dominer, alimentés par des infrastructures incomplètes et une défiance persistante à l’égard des innovations numériques. La fragmentation réglementaire, en particulier, alourdit les coûts, qui oscillent en moyenne entre 7,4 % et 8,3 % – les plus élevés au monde.

La dépendance au dollar américain aggrave encore la facture : la double conversion nécessaire pour la plupart des transactions représente à elle seule 5 milliards de dollars de frais annuels pour le continent.

La ZLECAf et le PAPSS, piliers d’une souveraineté financière renforcée

Face à ces défis, la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et le Système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS) apparaissent comme des catalyseurs majeurs de transformation. Le PAPSS, en particulier, devrait permettre des paiements instantanés en monnaies locales, réduisant la dépendance au réseau SWIFT et stimulant l’intégration économique régionale.

Mais, souligne le rapport, ces outils ne pourront pleinement libérer leur potentiel sans une interopérabilité renforcée entre les différentes plateformes numériques et une infrastructure de paiement modernisée et résiliente.

Pour tirer parti de cette croissance attendue, Oui Capital appelle les régulateurs africains à instaurer un cadre commun à l’échelle du continent. Parmi les priorités : l’octroi de licences transfrontalières aux fintechs, la mise en place d’une norme unifiée de vérification d’identité (KYC) et l’adoption de règlements blockchain adossés à des stablecoins.

L’objectif est clair : rationaliser les transactions, diminuer les coûts et réduire la dépendance au dollar, afin de renforcer la souveraineté monétaire et financière de l’Afrique.

Le rapport insiste sur la nécessité d’une coopération étroite entre les régulateurs, les fintechs et les opérateurs de mobile money. Cette synergie apparaît comme la clé pour surmonter les obstacles et libérer la croissance annoncée. L’Afrique dispose aujourd’hui de toutes les cartes pour bâtir un écosystème de paiements transfrontaliers inclusif, sécurisé et compétitif – à condition de relever les défis structurels qui freinent encore sa pleine réalisation.

Si les recommandations de Oui Capital sont mises en œuvre, le continent pourrait se doter, d’ici 2035, d’un système de paiements transfrontaliers fluide et résilient, moteur de la prospérité partagée que les dirigeants africains appellent de leurs vœux.

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