En Afrique de l’Est, l’invasion acridienne menace la sécurité alimentaire

criquets

Par Anass BELHAJ

La région d’Afrique de l’Est est sous l’emprise d’une nouvelle invasion de criquets pèlerins, ces insectes ravageurs qui ne pèsent que quelques grammes mais s’abattent sur tout ce qui est vert. Depuis leur arrivée en masse dans la région fin 2019, ces essaims ont déjà envahi le Kenya, l’Éthiopie, l’Érythrée, Djibouti, la Somalie, l’Ouganda, le Soudan et la Tanzanie.

Redoutés depuis des siècles, ces « affamés volants » aggravent le problème de sécurité alimentaire dans l’une des régions les plus pauvres et les plus vulnérables du monde, ravageant aussi bien l’herbe des savanes pâturées par le bétail que les plantes cultivées pour l’Homme comme le sorgho, les céréales et le maïs.

Malgré un déclin antérieur, les pluies abondantes des dernières semaines risquent d’entraîner « une reproduction avec des éclosions et la formation de bandes larvaires supplémentaires dans l’est de l’Ethiopie et le nord de la Somalie », a averti l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dans son dernier rapport publié vendredi.

Les conditions climatiques sont malheureusement idéales pour la multiplication des criquets ravageurs qui, depuis leur arrivée dans la région en 2019 en provenance du Yémen, ont eu le temps de pondre des œufs pour la reproduction d’une nouvelle génération qui pourrait être plus grande et plus vorace que la précédente.

La FAO qualifie le criquet pèlerin de « ravageur migrateur le plus destructeur au monde » et caractérise le phénomène actuel de « recrudescence », correspondant à un impact à l’échelle d’une région. L’Organisation onusienne prévoit des éclosions et la formation de bandes dans l’est de l’Ethiopie et le nord de la Somalie, avec des envols et la formation d’essaims à partir de fin juin.

« Une reproduction locale serait également possible au Kenya, de même qu’une reproduction à petite échelle dans les zones de reproduction estivale du Soudan et de l’ouest de l’Erythrée dès le début des pluies saisonnières », a indiqué le rapport de la FAO, notant que la nouvelle génération d’essaims immatures devrait en outre se déplacer vers la région d’Afar dans le nord-est de l’Ethiopie pour la reproduction estivale en août et septembre.

Pour contrer cette nouvelle menace acridienne, la FAO préconise le renforcement de la lutte à travers des opérations aériennes de pulvérisation, insistant sur la nécessité de mettre en place des équipes de surveillance et de contrôle au sol pour la détection et la réduction des infestations de bandes larvaires avant qu’elles ne prennent leur envol et ne forment une nouvelle génération d’essaims immatures à partir de fin juin.

Dans la région d’Afrique de l’Est, les invasions acridiennes impactent considérablement les moyens de subsistance et pèsent sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle de plus de 10 millions de personnes. Elles y aggravent la pauvreté et la vulnérabilité des ménages vivant déjà dans des conditions précaires.

En phase grégaire, un petit essaim de criquets pèlerins consomme en une journée une quantité de nourriture équivalente à celle de 35.000 personnes. À terme, l’invasion acridienne risque de provoquer un exode rural, un appauvrissement des ménages et la réduction de la main-d’œuvre agricole.

Cette nouvelle crise environnementale a considérablement augmenté la pression sur une région qui était déjà soumise à des aléas climatiques extrêmes, notamment la sécheresse et les inondations.

D’après les observateurs, une riposte rapide et efficace devient de plus en plus urgente pour éviter qu’à la crise sanitaire du Covid-19 s’ajoute une dramatique crise alimentaire dans la région.

( Avec MAP )