En Afrique du Sud, les données publiées jeudi révèlent que 75 % des cigarettes vendues proviennent du commerce illicite, contre seulement 19 % en 2014, signe d’une mainmise croissante des réseaux criminels sur le marché du tabac.
Le commissaire de l’Administration fiscale sud-africaine (SARS), Edward Kieswetter, a affirmé, mercredi devant le comité parlementaire de la santé, que le fisc a perdu environ 84 milliards de rands en recettes fiscales sur les droits d’accise, entre 2020 et 2022, rapporte le journal The Citizen.
Le SARS a indiqué qu’entre 2020 et 2025, environ 40 milliards de rands de recettes fiscales légitimes ont disparu à cause du commerce illicite, les syndicats criminels exploitant des frontières poreuses, une application de la loi faible et les perturbations liées au confinement Covid pour renforcer leur domination.
« Nous faisons face à une criminalité à l’échelle industrielle impliquant des flux financiers sophistiqués, des sociétés écrans et des complices dans plusieurs secteurs – y compris la banque et la logistique », a souligné Kieswetter.
Il a ajouté que les enquêtes ont lié certains réseaux du tabac au blanchiment d’argent via des raffineries d’or, des projets immobiliers et des investissements offshores.
Kieswetter a attribué l’origine des défis actuels du SARS au démantèlement des capacités d’application de la loi entre 2014 et 2018, période au cours de laquelle « le marché illicite du tabac est passé de 30 % à plus de 50 %, tandis que les recettes d’accise stagnaient malgré la hausse de la consommation ».
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Entre avril 2024 et septembre 2025, le SARS a procédé à 576 saisies pour une valeur de 265 millions de rands, suspendu plusieurs licences de fabrication et transmis 86 affaires criminelles pour poursuites.
Ces efforts ont déjà permis de récupérer 6,1 milliards de rands et conduit à trois condamnations avec des peines de prison allant jusqu’à 10 ans.
Kieswetter a appelé le parlement à soutenir un financement supplémentaire pour recruter 300 agents d’accise et 100 auditeurs, affirmant que sans réinvestissement dans l’application de la loi, le système fiscal continuerait à saigner.
« Le secteur du tabac illicite n’est pas un problème isolé ; c’est un microcosme d’une économie criminelle beaucoup plus vaste », a-t-il relevé.
De son côté, le Service de police sud-africain (SAPS) a reconnu que le marché illégal du tabac, autrefois considéré comme une simple nuisance liée à la contrebande, est désormais une « menace nationale prioritaire » pour la stabilité économique et la sécurité de l’État.
Maropeng Mamotheti, commissaire divisionnaire, a indiqué que le commerce illicite de cigarettes est actuellement dirigé par des cartels répartis sur cinq niveaux : financiers et fabricants, contrebandiers, distributeurs, revendeurs et consommateurs, liés au trafic de drogues, à la traite d’êtres humains et au blanchiment d’argent.
Le Zimbabwe, le Mozambique et le Botswana ont été identifiés comme les principaux pays sources de cigarettes illicites, entrant par des postes frontaliers tels que Beitbridge, Lebombo et Skilpadshek.